Actualités
Espace client

Les troubles du voisinage

Publié le : 25/10/2024 25 octobre oct. 10 2024

Nuisances sonores, nuisances visuelles, olfactives, dégât des eaux... en somme, ces désordres dont un tiers comme son propre voisin en est la cause, peuvent être désignés comme des troubles du voisinage.
Alors que la jurisprudence de la Cour de cassation dégageait en 1986 le principe général du droit selon lequel « nul ne doit causer un trouble anormal de voisinage »1, s’inscrivant dans la continuité d’un arrêt de 18442, la loi reconnaît aujourd’hui quant à elle, depuis le 15 avril 20243, une responsabilité du fait des troubles de voisinage anormaux4. Ce faisant, c’est à l’aune du caractère anormal ou non du trouble par rapport aux inconvénients ordinaires du voisinage que pourra, ou non, être retenue la responsabilité de celui qui en est à l’origine.

Pour qu’une telle disposition soit applicable, il faut alors que, entre autres5, le propriétaire ou le locataire voisin (le rapport de voisinage pouvant être même indirect) soit à l’origine de ce trouble anormal au regard des inconvénients ordinaire du voisinage6. Ce dernier pouvant être visuel, sonore ou encore olfactif, il doit en outre avoir un caractère continu et permanent, ce qui signifie qu’un tel trouble, pour peu qu’il soit ponctuel ou ne se reproduise pas, ne vérifie pas ces conditions. Dans la logique de l’engagement de la responsabilité civile, sont exigés un fait dommageable, un préjudice ainsi qu’un lien de causalité entre le préjudice et le fait dommageable. Le fait dommageable étant ici le trouble du voisinage, reste alors à identifier le préjudice (qui peut être d’ordre pécuniaire, moral, d’agrément, esthétique...) dont il faudra prouver qu’il a été provoqué par ledit trouble. À titre d’exemple, la construction d’un immeuble privant ainsi le voisinage de tout ensoleillement a déjà pu être reconnue comme un trouble anormal du voisinage7.

Il convient toutefois de souligner l’existence de plusieurs exonérations à l’engagement de la responsabilité civile du fait de troubles anormaux du voisinage.

La loi émet en effet une première réserve au second alinéa de l’article qui la prévoit8. Est en effet exclue la responsabilité du tiers à l’origine du trouble, eût-il été anormal, lorsque la source de ce trouble est une activité en principe antérieure à l’installation de la personne lésée. Cela sous réserve que cette activité respecte la législation et la réglementation en vigueur, ainsi qu’elle se soit poursuivie dans des conditions qui n’ont pas aggravé ledit trouble. On peut alors, par conséquent, tout à fait imaginer l’hypothèse d’un particulier se servant de son terrain, dont il est le propriétaire, comme d’un garage pour véhicules motorisés. En aménageant ultérieurement sur un terrain proche, il serait impossible d’engager la responsabilité du propriétaire dudit terrain voisin sur le fondement d’un trouble anormal de voisinage, sous réserve du respect des conditions de conformité à la loi et aux règlements, ainsi qu’à la poursuite sans aggravation de cette activité depuis son initiation.

Par ailleurs, le second alinéa de l’article 1253 du Code civil qui prévoit cette exonération renvoie à l’article L311-1-1 du Code rural et de la pêche maritime, admettant une plus grande souplesse dans la vérification des conditions d’exonération en matière d’activités de source agricoles. Soumises aux mêmes conditions que les autres, elles bénéficient toutefois en effet de l’éventualité d’une aggravation du trouble causé si et seulement si cette aggravation résulte « de la mise en conformité de l’exercice de ces activités aux lois ou règlements », ou encore dans l’hypothèse où une telle aggravation se produirait sans modification substantielle de leur nature ou de leur intensité ».

Enfin, il existe une seconde exonération à l’engagement de la responsabilité civile du fait des troubles anormaux du voisinage. N’étant pas mentionnée dans les textes sus évoqués, il s’agit de l’existence ou non d’une faute de la personne lésée par le trouble. L’établir permettrait alors d’exonérer en tout ou en partie l’auteur du trouble anormal, se traduisant ainsi par une exonération totale ou partielle de l’indemnisation de la victime.

1 Arrêt de la deuxième chambre civile de la Cour de cassation du 19 novembre 1986, n°16-379
2 Arrêt de la Cour de cassation du 27 novembre 1844, Les grands arrêts de la jurisprudence civile, 11ème éd., Dalloz, n°74 : le trouble anormal étant celui excédant « la mesure des obligations ordinaires du voisinage »
3 Loi n°2024-346 du 15 avril 2024, publiée au Journal officiel du 16 avril de la même année
4 Article 1253 du Code civil
5 Une liste exhaustive, mais par là même restrictive, ayant été dressée à l’article 1253 du Code civil
6 Une jurisprudence constante affirmait déjà auparavant que « nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage excédant les inconvénients normaux du voisinage », voir par exemple l’arrêt de la troisième chambre civile de la Cour de cassation du 27 juin 1973, n°72-12.844
7 Arrêt de la 2ème chambre civile de la Cour de cassation du 28 avril 2011, n°08-13.760
8 Article 1253 alinéa 2 du Code civil

Historique

<< < 1 > >>
Services
Navigateur non pris en charge

Le navigateur Internet Explorer que vous utilisez actuellement ne permet pas d'afficher ce site web correctement.

Nous vous conseillons de télécharger et d'utiliser un navigateur plus récent et sûr tel que Google Chrome, Microsoft Edge, Mozilla Firefox, ou Safari (pour Mac) par exemple.
OK