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Droit civil – responsabilité et contrat

« Le contrat est une tête de pont jetée vers l’avenir », selon la lumineuse expression du Doyen CARBONNIER. Le contrat est synonyme de Liberté et de sécurité.


Difficile de ne pas s’incliner, face à la clarté de l’explication rédigée par le Professeur Michel de JUGLART, dans son ouvrage « cours de droit civil, tome 2[1] » :
« Il fut un temps où le contrat était considéré comme étant la seule source des obligations. A cette époque, les problèmes de responsabilité civile n’avaient pas l’importance qu’ils ont aujourd’hui. D’autre part, il n’était guère question de l’enrichissement sans cause ou de la gestion d’affaire. Aussi l’étude du droit des obligations se ramenait-elle, en définitive, à l’analyse de l’acte juridique et plus particulièrement du contrat. C’est là que se trouvait en quelque sorte le royaume de la volonté individuelle. La philosophie du XVIIIème siècle permettait de donner un nom à cette influence de la volonté dans le droit des obligations : on parlait d’autonomie de la volonté. On voudrait dire par là que la volonté de l’homme était souveraine dans l’organisation du droit des obligations.

Il y avait là une sorte de revanche à l’égard des contraintes de l’ancien régime. La volonté affirmait librement sa toute-puissance. Elle se trouvait même être à l’origine de tout le système politique en vigueur à cette époque. En effet, à la base de la philosophie individualiste, il y a ce que l’on appelle le contrat social : les citoyens, qui ne sont pas en mesure de tout faire par eux-mêmes, vont « déléguer » leurs pouvoirs à certaines personnes qui seront leurs représentants. Mais, s’agissant d’un régime démocratique, ces représentants n’oublieront pas que l’autorité vient du peuple et que ce peuple, sur la base du contrat social, a simplement délégué quelques-unes de ses prérogatives à ceux qui le gouvernent.

Le contrat va devenir, dans un tel climat, une sorte d’institution sacro-sainte. Le législateur devra bien se garder d’élaborer dans ce domaine des règles impératives. Seules seront de mise les règles interprétatives. La volonté demeure ainsi souveraine et ce n’est que dans la mesure où elle n’a pas pu tout prévoir dans la formation du contrat que le pouvoir législatif interviendra pour l’aider en quelque sorte et pour la protéger. Les exigences de l’ordre public, que cet ordre public soit économique ou social, sont extrêmement limitées.

Au surplus, les volontés individuelles ne sont pas seulement libres ; elles sont aussi égales. Les hommes naissent libres et égaux. Par conséquent, il n’y a pas lieu, pour l’instant tout au moins, de faire intervenir le législateur pour qu’il assure, par exemple, la protection d’un contractant contre l’autre. Le contrat est censé avoir été fait par des personnes libres et égales. « Tout ce qui est contractuel est juste », pourra dire un auteur à cette époque.

Aujourd’hui, le problème ne se pose plus de la même façon, bien loin de là. Le climat économique, social, voire politique s’est profondément transformé. Le contrat n’est plus cette manifestation intangible des volontés individuelles.

Le législateur, le juge lui-même, le pouvoir réglementaire parfois n’hésitent pas à intervenir dans la formation ou dans l’exécution des contrats. Les règles vont devenir alors de moins en moins interprétatives et de plus en plus impératives. On va parler du dirigisme législatif ou jurisprudentiel ; et ce sera là l’occasion pour les interprètes de mettre en relief ce qu’ils appellent le « déclin du contrat ».


(...)
Le contrat est synallagmatique ou bilatéral lorsque les contractants s’obligent réciproquement les uns envers les autres.

Il est unilatéral lorsqu’une ou plusieurs personnes sont obligées envers une ou plusieurs autres sans que, de la part de ces dernières, il y ait un engagement.

Ce qui caractérise le contrat synallagmatique, c’est la réciprocité et l’interdépendance des engagements.
Si nous prenons par exemple, le contrat de vente, type même du contrat synallagmatique, nous constatons qu’à côté de l’obligation du vendeur de livrer la chose objet de la vente, il y a l’obligation de l’acheteur de payer le prix.

Ces deux obligations sont en relation très étroite, tellement étroite même que l’une ne peut pas exister sans l’autre ; c’est ce qui conduit à dire que si, par exemple, l’acheteur ne règle pas le prix, le vendeur n’a pas à remettre la chose.

La situation est profondément différente avec les contrats unilatéraux puisque, selon l’article 1103 C. civ., une des parties seulement se trouve obligée envers l’autre. Nous ne relevons pas, par conséquent, cette réciprocité et cette interdépendance qui caractérisent le contrat synallagmatique.

Il est donc intéressant de savoir quels peuvent bien être ces contrats unilatéraux. A ce propos, on cite, en particulier, la donation puisque, en effet, dans cet acte, il n’y a d’engagement que de la part du donateur. Cependant, dans quelques cas, le donataire se trouve lui-même engagé : il en est ainsi lorsque la donation est faite « avec charge », c’est-à-dire lorsque celui qui reçoit la somme ou la chose en général doit affecter cette somme ou cette chose à la réalisation d’un objectif déterminé.

Mais on se demande également si dans cette catégorie des actes unilatéraux, il ne convient pas de faire figurer ce que l’on appelle les contrats réels, c’est-à-dire, en particulier, le prêt ou le dépôt.

Les Romains estimaient que de tels contrats ne pouvaient se former que par la remise de la chose (re). Cette interprétation a été maintenue par certains auteurs à notre époque, de telle sorte qu’un contrat comme le dépôt, par exemple, apparaîtra comme étant un contrat unilatéral, c’est-à-dire comme ne créant d’obligation qu’à la charge de celui qui a reçu la chose en dépôt (obligation de restituer cette chose)

Il existe cependant, dans la doctrine contemporaine, un certain nombre d’auteurs qui estiment que la conception romaine doit être abandonnée. A leurs yeux, dans notre droit des contrats, ce qui l’emporte aujourd’hui, ce n’est pas l’accomplissement d’un geste comme, par exemple, la remise d’une chose, mais bien la volonté individuelle telle qu’elle se manifeste dans l’expression du consentement. On en déduit alors que dans un contrat comme le prêt, les deux parties sont engagées l’une envers l’autre dès la manifestation de leurs consentements, la remise de la somme ou de la chose n’étant que l’exécution de l’engagement du prêteur. S’il en est ainsi, le prêt ou encore le dépôt vont constituer des contrats synallagmatiques auxquels on pourra appliquer les règles que l’on fait jouer dans tout contrat synallagmatique.

(...)

Le contrat moderne est, en principe, consensuel. Cela signifie que l’acte juridique est formé à partir du moment où les consentements sont échangés. Autrement dit, c’est la volonté individuelle qui va jouer un rôle de premier plan.

Déjà, avant la promulgation du Code civil, on avait l’habitude de dire que « les hommes sont liés par les paroles comme les bœufs sont liés par les cornes ». On voulait dire par là que c’est la parole donnée qui compte. L’homme doit faire honneur à sa parole. C’est là, à la fois, un précepte de droit et un précepte de morale.

En même temps, s’estompaient à l’horizon les vieilles règles du Droit romain qui se montrait très exigeant dans ce domaine et n’admettait l’existence d’un contrat que dans la mesure où telle formalité avait été respectée, tel geste avait été accompli ou encore telle chose avait été remise. Le formalisme a donc plus ou moins disparu à notre époque.

Les contrats solennels sont de moins en moins nombreux. Cependant, il en existe encore quelques-uns : c’est le cas de la donation, du contrat de mariage ou encore de la constitution d’hypothèque. Nous avons là affaire à ce que l’on appelle des actes authentiques pour lesquels l’intervention du notaire est indispensable, de telle sorte que la forme est bien l’un des éléments constitutifs de l’acte. »

Le contrat envisage l’avenir, ses jours heureux, ses difficultés mais aussi l’imprévu, de sorte qu’il ne serait pas faux de croire qu’il est omniscient. Il faut, tout de suite, rappeler que le contrat de droit français est succinct car complété par les codes et la jurisprudence, à l’inverse du contrat de droit anglais, qui se veut le plus exhaustif possible. 

Le contrat à force de la « Loi » entre les parties. Il génère un lien de droit, c’est-à-dire que les parties sont titulaires de droits mais aussi tributaires d’obligations. Le Code civil consacre cette loi des parties, mais il consacre d’autres règles (l’ordre public). En d’autres termes, le contrat doit respecter les normes supérieures à la loi, ainsi que toutes les normes d’ordre public (qui peuvent même être placées à un échelon inférieur dans la pyramide de Kelsen, comme par exemple des arrêtés municipaux).

Tous les contrats doivent respecter le droit commun des contrats, inscrit dans le Code civil, (conditions de validité, vices du consentement, responsabilité contractuelle, etc).

Force est de constater qu’on ne conclut jamais un contrat en général, mais seulement des contrats spéciaux : on achète, on loue, on s’assure. Le droit commun des contrats connait donc de quelques règles éparses que naissent à la lumière de la spécificité de tel ou tel contrat. En effet, le contrat trouve une traduction qu’à travers une opération particulière. Cette opération imprime à l’accord des volontés des spécificités. Ces spécificités appellent un régime juridique distinct. En droit français (droit interne) le Code Civil exprime cette idée : « les contrats, soit qu’ils aient une dénomination propre, soit qu’ils n’en aient pas, sont soumis à des règles générales, (...). Les règles particulières sont établies (…) ». Et effectivement, il existe des règles propres à certaines opérations : le contrat de vente, le contrat de location, etc. Ces règles sont inscrites également dans le code civil. Cela se complique, car il existe d’autres règles, si le contrat de vente est un contrat commercial, administratif voire un contrat relevant du droit de la consommation. De même, certaines clauses ne seront pas soumises au même régime juridique (la clause compromissoire, la clause élusive de responsabilité).

Pire, pourrait-on penser, la présence du critère d’internationalité « transforme » le contrat en un contrat de droit international.

Dans de nombreux cas, les opérations classiques (vente, distribution, transport) seront régies par des conventions internationales. Ces conventions sont plus ou moins obligatoires. Elles permettent de compléter intelligemment un contrat et d’apporter des solutions à des différends.

Par exemple, le contrat de vente en droit français relève des règles du droit commun et de règles spécifiques de la vente. En droit de la consommation (possibilité de renoncer à la vente après la remise de la chose), en droit commercial (règles de preuve) et en droit administratif (le régime des marchés publics) des spécificités apparaitront. En droit international, il relèvera, le plus souvent, de la Convention de Vienne de 1980. Et si on complète le tableau, le droit des contrats allemands de vente distingue du droit français, anglais ... 

Il est impossible de connaitre toutes les règles – fort heureusement, néanmoins il y des fondamentaux à maitriser.

Le droit vise seulement à apporter de la confiance à une opération ou tout au moins d’atténuer le risque juridique (risque pénal, risque de contentieux et les impayés. Le risque client est trop souvent vécu par les entreprises comme une fatalité, alors qu’il peut être réduit si l’entreprise prend des précautions :
        Avant de conclure un contrat, l’entreprise doit se renseigner sur la solvabilité de son client (est-ce une société ou non[1], patrimoine niveau d’endettement, coordonnées bancaires, si possible, etc.) en s’adressant au tribunal de commerce pour commander :
  • ses derniers bilans,
  • son « extrait Kbis », qui est l’équivalent, pour les entreprises, de l’extrait de naissance des particuliers – plus complet –, ainsi que
  • « L’état des privilèges et nantissements », qui renseigne sur les dettes les plus importantes à l’égard du Trésor Public, l’URSSAF, les banques, etc. On peut aussi les commander par internet.
Lors de la conclusion du contrat (c’est-à-dire lors de la prise des engagements), l’entreprise doit également formaliser les engagements du client au moyen d’une chaîne de documents commerciaux écrits : bons de commande signés du client (comportant les conditions de paiement au sein des conditions générales) bons de livraison, tout document justifiant de l’existence du montant de la commande, les modalités de paiement et de la livraison.

A ce titre, il faut contrôler l’efficacité des documents commerciaux par leur contenu et leur présentation. Cette efficacité résulte de la présentation matérielle des conditions générales de vente, de leur contenu et plus précisément de certaines dispositions ayant pour objet ou pour effet la prévention des impayés.

Il faut que le document d’envoi comporte un renvoi explicite aux conditions générales de vente qui seront imprimées au verso du document ou jointes en annexe. Il faut donc absolument indiquer de manière lisible au recto de l’imprimé, en caractères bien apparents et au-dessus de la signature de l’acheteur, que la commande sera exécutée conformément aux conditions générales de vente jointes en annexe ou imprimées au verso.

Sinon, les conditions générales, qui doivent être claires, précises, lisibles, perdraient toute leur efficacité.
Les conditions générales peuvent prévoir certains avantages particuliers pour le créancier.  

Par exemple :
Une clause contractuelle d’intérêts peut être prévue dans le contrat. A défaut, et en principe, seul l’intérêt légal pourra être exigé et uniquement à compter d’une mise en demeure ou d’une assignation en justice.

Une clause de déchéance du terme peut être prévue. En cas de non-paiement d’une seule des échéances convenues, la totalité de la créance peut devenir exigible.
une ou plusieurs clause(s) résolutoire(s) pour non-respect de ses obligations par l’acheteur

Une clause pénale peut être envisagée. Son objet est de fixer forfaitairement le montant des dommages et intérêts susceptibles d’être réclamés en justice, mais elle peut être réduite par le juge.

Une clause de réserve de propriété pour les ventes de marchandises sera très certainement inscrite. Elle permet de reprendre les marchandises non payées si elles sont identifiables, non transformées ni incorporées dans un ensemble et encore entre les mains de l’acheteur initial.

Une clause attributive de juridiction pourra être fixée. Parfaitement valable entre commerçants, elle détermine le tribunal territorialement compétent pour connaître du litige.

Enfin, il peut être utile de prévoir des stipulations concernant l’octroi préalable de garanties particulières (cautions, avals, etc.…) en cas de difficultés pressenties liées notamment à la solvabilité future du client.

Il est nécessaire d’être extrêmement précis et vigilant sur le contenu de ces diverses clauses, pour la rédaction desquelles le recours à un professionnel du droit est fortement recommandé.

Il ne faut pas oublier que les dispositions du Code de la Consommation peuvent s’appliquer dans les rapports entre professionnels (ayant des activités différentes) et que, dans ces conditions, certaines clauses pourraient être qualifiées de clauses abusives qui pourraient ainsi être annulées.

Il ne faut pas oublier les conditions générales (de vente, d’achat ou de service). Au niveau de la hiérarchie juridique, elles sont au-dessus des contrats. En général, elles constituent le vrai contrat. Elles doivent être connues (et donc signées) par les cocontractants.

Le choix de la langue peut différer des choix du droit.

Le droit civil régit le droit commun des contrats. Il est donc le support de tous les autres contrats, à savoir le droit du travail, le droit des sociétés, le droit de la famille, etc.
Le cabinet de Me Martin ne manquera pas de vous conseiller quant à la rédaction de tel ou tel contrat, ou d’obtenir l’exécution dudit contrat.
 
[1] I.e., présence d’une personnalité morale (société) ou pas (entreprise)
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